Source du Langwell
Terre du Milieu.
Au Troisième Âge du Monde, là où les Montagnes Bleues (Ered Luin) s'élèvent, farouches et glacés, au Nord du val de l'Anduin, jaillit la Source du Langwell, une des plus pures eaux du Nord. Elle prend naissance parmi les pierres couvertes de givre, sous les racines noueuses des pins accrochés aux falaises, et son murmure se mêle au souffle des vents descendus des cimes. Le Langwell n'est encore qu'un filet d'argent, un chant discret glissant entre les roches moussues, mais déjà il porte dans sa clarté la promesse des vastes fleuves de l'Est.
Les Nains des Monts Gris la nommaient Luithadîn, « celle qui chante sur la pierre », car son cours, paré d'écume blanche, bondit de marche en marche, formant mille cascades au cœur des gorges gelées. En hiver, les eaux se couvrent d'un voile de glace, mais sous la surface, la vie persiste, et le son assourdi du torrent résonne comme le battement d'un cœur endormi. À l'aube, lorsque le soleil perce les brumes, la lumière s'y divise en éclats bleus et dorés, et les vapeurs s'élèvent en colonnes mouvantes, pareilles à des esprits des anciens jours.
C'est là, dans ces replis secrets des montagnes, que commence le Grand Fleuve des Hommes, l'Anduin. Le Langwell descend du Nord pour rejoindre les eaux du Greylin, et de leur union naît le cours majestueux qui traversera les terres d'Eriador et du Rohan, puis les plaines du Gondor, avant de se jeter dans la Mer du Sud. Mais ici, tout est encore jeune et sauvage. Le vent parle aux sapins, les pierres gardent la mémoire du froid, et l'eau, claire comme du cristal, coule libre, ignorante encore des guerres et des royaumes à venir.
Il se dit que, certains soirs de Lune, les Aigles des montagnes se posent sur les roches au-dessus de la source. Alors, leurs ailes immenses s'emplissent de la lueur d'argent, et leurs cris se mêlent au fracas des chutes, comme si le ciel lui-même saluait la naissance d'un fleuve. Et sous les étoiles du Nord, le Langwell poursuit son chemin, fidèle et limpide, gardien du souvenir des neiges éternelles et de la pureté première des monts d'où il naquit.
