Gemmes naines

Terre du Milieu.

Sous les montagnes du Nord, au cœur de la pierre et des ténèbres, les Nains creusent depuis les jours anciens, cherchant dans les veines de la Terre ce que nul autre peuple ne saurait trouver. Parmi les métaux et les minéraux que leur art fait naître, ils tirent aussi de la roche les gemmes claires, qu'ils nomment en leur langue secrète zaghîn-baraz, « les feux endormis ». Car ces pierres ne brillent pas d'un éclat emprunté au soleil, mais d'une lumière propre, née de la profondeur et du froid des entrailles du monde.

Certaines, dit-on, sont trouvées dans les rivières souterraines, pétries de cristal et de glace, où l'eau coule sans jamais voir le jour. Là, les gouttes tombent durant des siècles, façonnant des sphères limpides que les Nains extraient avec un respect presque religieux. Elles conservent dans leurs cœurs le miroitement de l'eau et le souvenir du silence. D'autres proviennent des galeries des Montagnes Grises (Ered Mithrin), où la pierre se fend sous le marteau et révèle des gemmes d'un bleu d'hiver, translucides comme la glace figée sur les rochers. Ces gemmes, polies à la main, sont si pures qu'on peut y voir trembler la flamme d'une lampe comme une étoile captive.

Les plus anciennes légendes de Khazad-dûm racontent qu'au Premier Âge, les artisans de Durin façonnaient des joyaux qu'aucune lumière ne ternissait. Ils les appelaient gheled-dûm, « les yeux du profond repos ». Leur éclat rappelait celui des premières étoiles vues depuis les montagnes de l'Est. Les Elfes eux-mêmes les admiraient, car nul peuple, pas même le leur, ne savait unir ainsi la beauté à la matière brute, la clarté à la pesanteur du monde.

Les Nains ne considéraient pas ces gemmes comme de simples trésors. Elles étaient pour eux le reflet de la perfection cachée de la Terre, l'écho des pensées d'Aulë au moment de la création. Aussi les conservaient-ils souvent dans des coffres scellés, non pour les vendre, mais pour les contempler à la lumière des torches, dans le silence de leurs grandes salles. Leur éclat froid emplissait alors la pierre d'une clarté bleue, comme si l'eau des montagnes coulait encore dans le cœur du roc.

Quand la guerre vint et que les royaumes s'effondrèrent, beaucoup de ces gemmes furent perdues. Certaines roulèrent dans les lits des torrents, d'autres furent englouties sous les ruines d'Erebor ou scellées dans des galeries oubliées. Mais les Nains disent encore que dans certaines cavernes du Nord, là où la glace ne fond jamais, les pierres brillent toujours faiblement dans l'obscurité, gardiennes silencieuses du travail de leurs pères. Et quand le vent descend des montagnes, il porte parfois un son cristallin, comme le tintement d'une gemme qui se brise, ou qui s'éveille à la lumière du monde.

Photo : Gemmes naines — Terre du Milieu.